Le mercredi 24 mars à 19 heures : "Sources, Suites et Fins de partie", textes de Samuel Beckett lus en bilingue par Antony Suter...
Samuel Beckett : précurseurs et progéniture
Tailpiece
who may tell the tale of the old man ? weigh absence in a scale ? mete want with a span ? the sum assess of the world’s woes ? nothingness in words enclose ?
Post-scriptum
qui peut raconter
l’histoire du vieux ?
peser l’absence dans la balance ?
mesurer le manque d’un pont ?
la somme estimer
des malheurs du monde ?
le néant de
mots enfermer ?Dans un essai intitulé "Les précurseurs de Kafka", Jorge Luis Borges (Labyrinthes) pose le problème des prédécesseurs d’un auteur. Il suggère que c’est en quelque sorte Kafka lui-même qui crée ses propres aïeux littéraires, en mettant en valeur dans ses romans les ressemblances avec leurs œuvres. A partir de là, nous avons tâché de rassembler quelques textes fondateurs :
Gérard de Nerval, le sonnet, "Artémis" ;
Arthur Rimbaud, "Le bateau ivre"/"Drunken Boat", traduit par Beckett ;
Marcel Proust, A la recherche du temps perdu (début), traduction de C.K. Scott Moncrieff Remembrance of Things Past, Swann’s Way ;
James Joyce, "Anna Livia Plurabelle" tiré de Finnegan’s Wake, tr. Beckett ;
Paul Eluard, Poèmes (traduction Samuel Beckett).
Le tout sera agrémenté d’une recette de pain grillé particulièrement beckettienne et d’un exposé des goûts culinaires de Monsieur René Descartes. Nous avons affiné notre choix de textes pour inclure une partie de la progéniture littéraire de Beckett : Nancy Huston, Limbo / Limbes ; et Eva Figes, Bedsitter, traduction française de Nathalie Vincent-Arnaud.
Notre programme sera également parsemé de poèmes de Beckett, dont des extraits de Whoroscope, et sera pour l’essentiel en bilingue. Une des qualités essentielles de l’œuvre beckettienne consiste en la traversée des langues.
Lady Love
She is standing on my lids And her hair is in my hair, She has the colour of my eye, She has the body of my hand. In my shade she is engulfed As a stone against the sky. She will never close her eyes And she does not let me sleep
And her dreams in the bright day Makes the suns evaporate, And me laugh cry laugh, Speak when I have nothing to say.
Dame d’amour
Elle se tient sur mes paupières,
Ses cheveux dans mes cheveux.
Elle est des teintes de mon œil,
Elle a le corps de ma main,
Elle s’engouffre dans mon ombre
Comme une pierre contre le ciel.
Elle ne fermera jamais les yeux
Et elle ne me laisse pas dormir.
Et ses rêves au clair du jour
Font disparaître les soleils,
Me font rire pleurer et rire,
Parlent quand je n’ai rien à dire.
Traduction des poèmes cités de Beckett : Anthony Suter
A.S., octobre 2009